Love : La vie débridée

La vie débridée de la jeunesse métropolitain

Parfait ambassadeur en France de la culture du « buzz », du « trash » et du « clash », Gaspar Noé – on s’en souvient – s’était illustré en 2002 avec Irréversible. Film dans lequel il imposait complaisamment au spectateur, et durant pas moins de neuf minutes, le viol de Monica Bellucci.

Puis en 2009, vint Enter the void, qui narrait sur un mode hallucinatoire l’expérience psychédélique de jeunes bobos en peine d’eux issus des élites mondialisées et échoués à Tokyo. Rarement, admettons-le, un film n’aura autant mérité son titre…

Avec Love, sorti récemment sur les écrans, l’intrigue prend place à Paris mais la sociologie reste fondamentalement la même que celle du précédent film, comme en attestent par ailleurs le titre ainsi que le tournage en anglais…

Personnages en perte de repères et déculturés par la doxa de leur milieu décadent (auquel appartient Gaspar Noé), Murphy et Electra, la vingtaine, forment un couple lambda tel qu’on en voit souvent aujourd’hui en métropole : enclin à multiplier les « expériences », sous couvert de liberté et d’émancipation, et à jouer avec le feu…

Les deux protagonistes, pour qui le comble de l’ouverture d’esprit et de l’enrichissement personnel revient spontanément à partager un joint avec une inconnue, à lui proposer un «  plan à trois », à visiter les clubs échangistes, voire – pourquoi pas – à sucer un trans pour satisfaire au fantasme de mademoiselle, s’affichent, selon Noé, comme représentatifs de cette fougueuse jeunesse si chère à l’imaginaire intellectuel progressiste auquel, semble-t-il, nous devrions céder sans hésiter.

Tout cela, en vérité, pour mieux tromper la vacuité d’une existence misérable, un brin consumériste, et foncièrement parasitaire, dans ces milieux interlopes que semblent abriter les beaux quartiers haussmanniens, où règne en maître l’homo festivus et où grouille la misère intellectuelle la plus crasse. Le sexe y est triste et balisé, rehaussé à grands renforts de champagne et de cocaïne, avec pour fond sonore les soliloques pompeux d’un personnage principal sans grande envergure et les morceaux les plus clichés de Bach et d’Erik Satie. Gaspar Noé, lui, est aux anges…

Convaincu de sa profondeur et de son irrévérence, au point de jouir en 3D sur le visage de son spectateur dans un gros plan pour le moins convenu, ce n’est pas sans hypocrisie que celui-ci consent finalement, par usage, à conclure son film en apportant un semblant de morale à une histoire sordide et racoleuse dans laquelle il n’a pourtant cessé jusque-là de se complaire. Postures et impostures d’un réalisateur qui joue, tour à tour, les rebelles puis les moraux incompris – monsieur se plaint de l’interdiction aux moins de 18 ans dont vient d’écoper son porno…

En périphérie du spectacle mortifère et cafardeux auquel nous sommes conviés, l’on constate par ailleurs que si le film est essentiellement tourné en anglais, la production n’en est pas moins française, comme pour nous rappeler – en cas d’oubli – qu’en France, la soumission aux puissants fut toujours le credo de la bourgeoisie.

Enfin, si la jeunesse française n’était pas devenue aussi conservatrice qu’elle l’est actuellement sur le plan des mœurs, n’en déplaise à tous les Gaspar Noé de l’industrie du divertissement, et notamment dans les territoires périurbains, nous serions en droit de penser que ce genre de film envoie un message clair à Daesh et autres fondamentalistes religieux sur l’état moral de nos jeunes, assurant encore aux prosélytes un bel avenir en Europe…

0 étoile sur 5.

Source : Boulevard Voltaire

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