Il est l’auteur de « Chroniques de Gaza », « Marj El Zouhour – La Vallée des Fleurs » et « Le chemin de la cour, les dirigeants israéliens devant la Cour Pénale Internationale ». Nous vous présentons ici des extraits de l’ouvrage, où l’auteur revient sur la responsabilité du gouvernement français dans la destruction et le massacre provoqués par l’opération militaire israélienne de juillet/août 2014 à Gaza.
« A la date de l’entrée en fonction de la Cour pénale internationale en 2002, la situation de la Palestine n’est guère enviable. La deuxième intifada fait rage. La Cisjordanie est occupée, plus de six-cent checkpoints la paralysent, le président de l’Autorité palestinienne est assiégé dans son QG de Ramallah. Le filtrage des entrées et des sorties dans la bande de Gaza a commencé, sur un mode mineur. Trente pour cent de la surface de la bande de Gaza correspond à des colonies israéliennes. Quelques milliers de travailleurs palestiniens franchissent chaque jour le terminal d’Erez pour aller travailler en Israël, pour certains dans les champs qui appartenaient jadis à leurs aïeux. Ils font vivre, dit-on, 250 000 familles. Israël se targue ainsi de participer au soutien de l’économie palestinienne en donnant du travail à ses habitants ! La violence fait rage, elle aussi sur un mode mineur. En moyenne un Palestinien est tué tous les trois jours.
Pas de quoi saisir la Cour ? Théoriquement si : crimes d’apartheid, crime de colonisation, destruction de biens civils (le port et l’aéroport de Gaza financés par l’Union Européenne, par exemple, viennent d’être détruits). Mais la Cour pénale internationale (CPI) n’en est qu’à ses premiers balbutiements. Dans l’esprit du public comme dans celui des acteurs politiques, la CPI, « c’est pour autre-chose », un massacre à grande échelle, une tentative de génocide… Pourtant il y a bien des massacres à grande échelle en Palestine au cours des années d’enfance de la CPI. […]
Dans cette édification du droit international humanitaire contemporain, la Cour pénale internationale a compétence à l’égard des crimes les plus graves qui touchent la communauté internationale : crimes de guerres, crimes contre l’humanité et crime de génocide. Ces crimes doivent avoir été commis après le 1er juillet 2002, c’est-à-dire après l’entrée en vigueur du statut.
Une définition, au moins approximative, de ces trois niveaux de crimes doit être connue du lecteur. Un crime de guerre est, en gros, une attaque contre des civils. Mais de nombreux actes sont aussi des crimes de guerre, comme nous le verrons plus loin. Le niveau suivant est le crime contre l’humanité, défini dès lors que les crimes de guerre ont un caractère systématique. Enfin le niveau trois est le crime de génocide, lorsque des crimes contre l’humanité sont commis contre une population dans le but de l’éradiquer, en raison de son appartenance à un groupe national, culturel, philosophique, religieux, etc. C’est -à-dire, pour reprendre une formule classique, que les victimes de génocide sont attaquées « en fonction de ce qu’elles sont et non pas de ce qu’elles font ». Ainsi, contrairement au sens commun, le crime de génocide ne débute pas à partir d’un certain nombre de victimes. Il est caractérisé par la volonté éradicatrice du groupe, même lente.
Nombre d’autres actes sont, en outre, considérés comme des crimes de guerre ou des crimes contre l’humanité : l’utilisation d’armes « interdites », d’armes « causant des souffrances inutiles », les armes indiscriminées (touchant sans distinction civils et militaires), mais aussi les transferts forcés de population, la colonisation, l’apartheid, la mise en esclavage, etc.
A la lecture de toutes ces formes de crimes, le lecteur le moins informé ne peut probablement s’empêcher de penser qu’Israël les a toutes abondamment pratiquées depuis 1948. Le même lecteur évoque peut-être aussi les dizaines de résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU condamnant Israël, restées sans lendemain. D’où un sentiment d’impuissance, si ce n’est de défaitisme. […]
Pour l’ONU, par le pouvoir exorbitant donné aux cinq membres permanents du Conseil de sécurité (le droit de veto), les sanctions ne peuvent s’exercer par définition sur aucun de ses membres permanents, et notamment sur le plus meurtrier (les Etats-Unis) ou ses protégés (Israël). Ainsi donc l’entrée en fonction de la Cour pénale internationale en 2002 est la bienvenue. Douze ans plus tard, les plus critiques disent qu’elle n’a pas fait ses preuves, voire exigent purement et simplement sa dissolution. Les optimistes l’observent dans une vision évolutive : le droit, toujours imparfait, se construit… à condition de s’en servir.
Le conflit israélo-palestinien n’est pas seulement le sinistre champ d’expérimentation des armes nouvelles, il doit être désormais le champ d’application du Droit nouveau. Les principaux massacres commis par Israël à l’encontre des Palestiniens depuis 2002 vont nous servir maintenant de fil conducteur. […]
Le samedi 12 juillet au matin j’enregistre une courte vidéo attaquant violemment le président Hollande. Je lui dis ses quatre vérités et prends comme canevas la tirade, à mon avis ratée, qu’il avait lancée pendant sa campagne électorale « Moi Président ». […] Pour les images, je prends le parti de montrer à celui qui chante avec Netanyahou les vraies victimes de sa légèreté : les cadavres des enfants recueillis dans les bras de leurs parents. Ce sont des images de la guerre de 2008-2009 qui m’ont été remises sur place à cette occasion : « Fais-en ce que tu veux ! ». »
Source : michel Collon
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