Son crime ? Avoir émis quelques doutes sur la réelle efficacité de la BRI (Brigade de recherche et d’intervention) lors des attentats du vendredi 13 dernier.
Cette question, nombre de gens, personnalités ou simples anonymes se la posent, non sans quelque raison. Une autre question, que ne s’est pas bien longtemps posée sa direction, consistait à savoir que faire du « trublion ». La réponse est tôt venue : viré dans la journée, tel un malpropre.
Pourtant, l’insolence de Thomas Guénolé était toute relative, puisque pointant juste le dénuement des forces de l’ordre, prises de cours en ce vendredi fatal. Les BRI manquaient donc « gravement d’hommes et de moyens ». Constat conclu par cette audace langagière – mais, après tout, c’est du direct -, qui le fit s’interroger sur une éventuelle démission de Bernard Cazeneuve, ministre de l’Intérieur ; démission qui, selon le journaliste incriminé, pouvait couler de source.
Bon… Il n’y a tout de même pas de quoi en faire un cake aux fraises. Et même si Thomas Guénolé a reconnu s’être appuyé, pour sa chronique, sur un article de la publication professionnelle La Lettre A qui s’est révélé « faux », demander la démission d’un ministre, en cas de faute grave ou pas, n’est jamais qu’une des traditionnelles figures de rhétorique, politicienne comme journalistique, depuis au moins le temps de Sully ou de Théophraste Renaudot.
Dans la foulée, Les Inrockuptibles se mêlent de la partie, critiquant son dernier essai, Les jeunes de banlieue mangent-ils les enfants ? Cette fois, que lui est-il reproché ? Par exemple de citer « une étude de 2012 conduite par l’AFEV (Association de la fondation étudiante pour la ville) qui montre que 75 % des Français ont une image positive des jeunes du pays en général, mais près de 60 % ont une image négative des jeunes de banlieue ». Mais aussi de relever ce fait avéré : « Les jeunes de banlieue traîneraient en bandes hostiles au pied des barres d’immeuble ? Celles-ci “ne pèsent que 2 % de la population jeune de cités”, écrit le politologue, renversant le problème : “Les jeunes de banlieue font partie des victimes des problèmes posés par les bandes”. »
Bref, l’homme ne fait jamais que son travail de journaliste/chroniqueur, même si l’hebdomadaire en question – un comble – lui reproche d’avoir sous-estimé le processus de radicalisation religieuse d’une partie de ces mêmes « quartiers ».
Plus intéressant demeure cet article de La Dépêche, lequel revient sur le cœur du sujet, soit « les failles du renseignement français et belge »… Bien sûr, le risque zéro n’est que vue de l’esprit et il est tout aussi évident qu’on ne saurait mettre un policier derrière chaque citoyen, fût-il ou non jugé « à risque ».
Il n’empêche que les membres du commando ayant ensanglanté Paris paraissent, malgré les filets déployés, s’être faufilés comme poissons dans l’eau. La faute à qui ? Éléments de piste : « La coupure de dialogue direct avec les services secrets syriens depuis quelques années ne permet plus de suivre à la trace ces types lorsqu’ils y vont s’entraîner ou préparer de futurs attentats. Malgré toutes les avancées technologiques, le renseignement humain reste essentiel dans la lutte contre le terrorisme. Des compétences qui ont été malheureusement diluées lors de la fusion des RG et de la DST dans la DCRI en 2008. »
Là, ce n’est pas la démission de Bernard Cazeneuve que les citoyens, journalistes ou non, seraient en droit d’exiger, mais celle de Nicolas Sarkozy qui, non content d’avoir voulu mettre en œuvre, plus ou moins en vain, la fusion de la police et de la gendarmerie, mais celle, autrement plus dirimante, de la DST et des RG, dont les fonctions et la culture étaient parfaitement distinctes, quoique complémentaires.
Mais de cela, a-t-on encore le droit de parler ? Il est à craindre que non. Thomas Guénolé ? Un chômeur de plus…
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